Septembre 2006

Lettre au rédacteur à propos de :
Side effects of Hyperbaric Oxygen Therapy in children with Cerebral Palsy
(Effets secondaires des traitements hyperbares chez les enfants avec la paralysie cérébrale)
(Pour lire la réponse originale en anglais, cliquer ici)

Monsieur,

En tant que cliniciens principaux impliqués dans la plus importante étude randomisée sur la thérapie à l'oxygène hyperbare (OTH) pour des enfants atteints de la paralysie cérébrale (PC) (1), de même que dans le projet pilote de McGill sur le même sujet (2), nous aimerions présenter nos commentaires sur l'article par Muller-Bolla et coll. (3) qui fut récemment publié dans votre journal au sujet de notre étude. Nous remettons en cause l'intention d'un tel article mais nous nous concentrerons sur des questions plus importantes. Nous déclarons qu'aucun des auteurs de cet article n'a été impliqué dans la prestation des traitements ou des évaluations des enfants. Le titre de l'article était incorrect en fait; il aurait plutôt du se lire comme suit it should have been "Effets secondaires des traitements hyperbares etc" parce que des enfants dans les deux groupes ont eu des problèmes aux oreilles.

D'abord, les auteurs essaient, même dans l'abstrait, de tromper les lecteurs au sujet du type de notre étude et des résultats de notre étude randomisée. Ils veulent nous faire croire qu'il y avait un groupe placebo. En fait les deux groupes d'enfants inclus dans l'étude ont reçu un traitement hyperbare. C'est la raison pour laquelle l'utilisation du terme ''contrôlé par placebo'' n'a pas été autorisé dans le papier qui a été publié à l'origine dans le Lancet.

De plus, il est également faux de prétendre que cette étude a démontré qu'il n'y avait aucun bienfait du traitement hyperbare pour ce groupe de patients. En fait, les deux groupes d'enfants traités avec deux dosages de traitement hyperbare très différents (1,75 ATA 100 % O2 et 1,3 ATA avec de l'air) se sont améliorés de façon significative.

Les améliorations motrices qui ont été mesurées avec la G.M.F.M. (4) étaient plus importantes, plus généralisées et ont été obtenues dans une période plus courte que la plupart des changements constatés dans toutes les autres études sur des thérapies conventionnelles pour le traitement des enfants atteints de paralysie cérébrale 5-18. Les enfants des deux groupes se sont améliorés en moyenne dix fois plus pendant les deux mois de traitement hyperbare (alors que toutes les autres thérapies et les médicaments avaient été arrêtés) que pendant les trois mois de suivi (alors que la médication et tous les traitements auxiliaires avaient été repris).

Ce changement impressionnant du taux d'amélioration indique clairement l'efficacité probable du traitement hyperbare. Le commentaire (9) du Lancet et même un rapport de l'American Health Agency20, ont conclu que l'hypothèse voulant que les deux traitements soient également efficaces devrait être retenue, possiblement comme l'hypothèse principale. Le protocole à très basse pression (1,3 ATA) n'avait été jamais essayé sur des enfants avec la PC avant l'étude, alors nous n'avons pas envisagé que ce soi-disant faux traitement produirait des changements d'une ampleur semblable à ceux observés avec le groupe d'OTH à 1,75 ATA. Ce fut une surprise fascinante pour chacun de nous et ce fut interprété dans le commentaire du Lancet comme une constatation remarquable.

Depuis cette étude, des rapports ont été établis sur l'efficacité possible d'un traitement hyperbare à basse pression dans les études sur des humains et des animaux10, et toutes les études conduites dans plusieurs pays avec l'OTH pour la PC ont démontré des résultats positifs.

La deuxième question importante que nous aimerions aborder est la fréquence et la sévérité des effets secondaires pendant le déroulement de notre étude. Nous étions responsables du centre dans lequel la majorité (65 sur 111) des enfants ont été traités pendant l'étude. Nous sommes convaincus que l'explication la plus probable de l'incidence élevée de barotrauma de l'oreille moyenne (BTOM) rapportée dans l'article de Muller-Bolla comparativement à d'autres études est due au fait simple que les enfants ont été systématiquement évalués, même en l'absence de symptômes, par des médecins inexpérimentés dans l'évaluation de BTOM. Ils avaient reçu l'instruction de rapporter toute rougeur de la membrane du tympan, qui était alors considérée comme un BTOM. La plupart des enfants recevaient l'autorisation d'être pressurisés le jour suivant un examen positif des oreilles. Seulement un enfant a dû se retirer de l'étude en raison de BTOM.

Il n'est donc pas surprenant qu'il y ait eu 46 BTOM rapportés comparativement à seulement 20 plaintes de douleur aux oreilles ! En fait, il n'y avait pas beaucoup plus de douleur d'oreille rapportée dans le groupe soumis à une pression plus élevée que dans le groupe à basse pression (11 comparativement à 9). On peut se demander quel serait le pourcentage de BTOM rapporté si une étude était entreprise avec les mêmes instructions, par des médecins inexpérimentés en ce qui a trait à la sortie de l'eau de plongeurs ou même sur des passagers débarquant d'un vol commercial. Le titre de l'article aurait dû être "Effets secondaires du traitement hyperbare etc." parce que des enfants des deux groupes ont eu des problèmes aux oreilles, mais ceux-ci étaient simplement causés par un changement de pression et n'avaient rien à voir avec le dosage d'oxygène utilisé.

Depuis cette étude, la plupart des protocoles d'OTH pour la PC recommandent maintenant une pressurisation de 1,5 ATA ou moins, ce qui réduit certainement les risques d'effets secondaires potentiels.

Nous étions responsables, durant les études, de plus de 4 500 pressurisations et nous connaissons plus de 40 000 autres traitements d'OTH reçus par des enfants atteints de PC que nous suivons régulièrement. Seulement quelques-uns ont été référés pour myringotomie en raison d'un BTOM. Nous n'avons pas vu une seule complication significative ou un seul dommage permanent. La réalité est que dans la grande majorité des cas, les enfants avec la PC peuvent entreprendre le traitement d'OTH sans complications significatives, et que dans la plupart des cas il améliorera leur qualité de la vie et celle de leurs familles.

Nous voulons préciser qu'il y a une répétition exacte mot pour mot d'un paragraphe de 20 lignes dans les deux dernières pages de l'article de Muller-Bolla qui répète une fausse information. Nous sommes les co-auteurs de l'article de Montgomery et coll. publié dans ce journal et il est faux de prétendre que nous ayons rencontré ou mentionné un seul cas de détresse respiratoire ou d'insuffisance respiratoire aiguë dans cette étude préliminaire. Les 25 enfants ont tous été traités pendant une heure à 1,75 ATA, et il n'y a eu aucun effet secondaire ou complication grave.

En conclusion, nous sommes d'accord avec le dernier paragraphe de cet article qui contredit en fait ce qui a été écrit avant, même dans le résumé. On y déclare que "Cette étude prouve que l'exposition à une basse pression hyperbare est associée à des signes mineurs de barotrauma comparativement à une très basse exposition. Tous les autres effets secondaires étaient rares et semblables dans les deux groupes."

L'OTH pour la PC est un traitement très prometteur et sécuritaire qui est maintenant appuyé scientifiquement par les résultats positifs de plusieurs études ouvertes. Nous recommandons certainement d'assurer une surveillance adéquate et reconnaissons le besoin de continuer la recherche.

Considérant qu'il y a peu de traitements efficaces pour les enfants atteints de paralysie cérébrale, nous sommes convaincus que la recherche portant sur la thérapie à l'oxygène hyperbare pour le traitement de la PC doit être poursuivie.

Nous devons confirmer les mécanismes fondamentaux responsables des changements impressionnants qui ont été observés avec des milliers d'enfants et mieux définir les indications et dosages appropriés pour les patients affectés par un trouble neurologique.

Dr Pierre Marois, M.D., FRCPC, physiatre
Dr Michel Vanasse, M.D., FRCPC, neurologue
Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Montréal, Québec, Canada

Références

1. Collet, J.P., Vanasse, M., Marois, P., Amar, M., Goldberg, J., Lambert, J. et al.. Hyperbaric oxygen for children with cerebral palsy: A randomized multicentre trial. The Lancet 2001; 357: 582-586.

2. Montgomery, D., Goldberg, J., Amar, M., Lacroix, V., Lecomte, J., Lambert, J., Vanasse, M., et Marois, P. Effects of hyperbaric oxygen therapy on children with spastic diplegic cerebral palsy: A pilot project. Undersea Hyperb Med 1999; 26:235-242.

3. Muller-Bolla M., Collet J.P., Ducruet T., Robinson A. Side effects of hyperbaric oxygen therapy in children with cerebral palsy. Undersea Hyperb Med 2006; 33:237-244

4. Russell, D.J., Rosenbaum, P.L., Cadman, D.T., Gowland, C., Hardy, S., & Jarvis, S. The gross motor function measure: A means to evaluate the effects of physical therapy. Develop Med Child Neurol 1989; 3: 341-352.

5. Knox, V., & Evans, A.L. Evaluation of the functional effects of a course of Bobath therapy in children with cerebral palsy: A preliminary study. Develop Med Child Neurol 2002; 44: 447-460.

6. Nordmark, E., Jarnlo, G.B., Hagglund, G.. Comparison of the Gross Motor Function Measure and Paediatric evaluation of Disability Inventory in assessing motor function in children undergoing selective dorsal rhizotomy. Develop Med Child Neurol 2000; 42: 245-252.

7. Sterba, J.A., Rogers, B.T., France, A.P., & Vokes, D., A.(2002). Horse back riding in children with cerebral palsy: Effect on gross motor function. Develop Med Child Neurol 2002; 44: 301-308.

8. Wright, F.V., Sheil, E.M., Drake, J.M., Wedge, J.H., Naumann, S. (1998). Evaluation of selective dorsal rhizotomy for the reduction of spasticity in cerebral palsy: a randomized controlled trial. Develop Med Child Neuro 1998; 40: 239-247.

9. Talking Points, Hyperbaric oxygen: Hype or hope? The Lancet 2001; 357:

10. Chang CF, Niu KC, Hoffer BJ, Wang Y, Borlongan CV. Hyperbaric oxygen therapy for treatment of post ischemic stroke in adult rats. Exp Neurol 2002; 166: 298-306.


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